« L’injustice sociale est une évidence si familière, elle est d’une constitution si robuste,
Qu’elle paraît facilement naturelle à ceux
qui en sont victimes »

                    Marcel Aymé

 

 

 

 

 

 

 

 

  N ‘oubliez de signer la pétition pour l ‘élevage émanant d ‘un collectif d éleveurs http://www.petitionpublique.fr/PeticaoVer.aspx?pi=P2013N37242.       Posté le : 13.03.2013…      
         13 août 2013 09:08:51 :: Bonne fête , Hippolyte , Radegonde
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INF# = 358 .
Envoyé le: 08.04.2011.
 
“Nous y sommes” par Fred VARGAS.

 « Nous y voilà, nous y  sommes.
 Depuis cinquante ans que cette tourmente menace dans  les hauts-fourneaux de l’incurie de l’humanité, nous y  sommes.
 Dans le mur, au bord du gouffre, comme seul l’homme sait le faire avec brio, qui ne perçoit la réalité que lorsqu’elle lui fait mal.
 Telle notre bonne vieille cigale à  qui nous prêtons nos qualités d’insouciance, nous avons  chanté, dansé. Quand je dis « nous », entendons un quart de  l’humanité tandis que le reste était à la peine. Nous  avons construit la vie meilleure, nous avons jeté nos  pesticides à l’eau, nos fumées dans l’air, nous avons conduit  trois voitures, nous avons vidé les mines, nous avons mangé  des fraises du bout monde, nous avons voyagé en tous sens, nous avons éclairé les nuits, nous avons chaussé des tennis qui clignotent quand on marche, nous avons grossi, nous avons  mouillé le désert, acidifié la pluie, créé des clones,  franchement on peut dire qu’on s’est bien  amusés.
 On a réussi des trucs carrément épatants, très  difficiles, comme faire fondre la banquise, glisser des  bestioles génétiquement modifiées sous la terre, déplacer le  Gulf Stream, détruire un tiers des espèces vivantes, faire  péter l’atome, enfoncer des déchets radioactifs dans le sol, ni vu  ni connu. Franchement on s’est  marrés.
 Franchement on a bien profité.

 Et on  aimerait bien continuer, tant il va de soi qu’il est plus rigolo  de sauter dans un avion avec des tennis lumineuses que de biner des pommes  de terre.
 Certes.
 Mais nous y  sommes.
 A la Troisième Révolution.
 Qui a ceci  de très différent des deux premières ( la Révolution  néolithique et la Révolution industrielle, pour mémoire) qu’on ne l’a pas choisie.
 « On est obligés de la faire, la Troisième  Révolution ? » demanderont quelques esprits réticents et chagrins.Oui.
 On n’a pas le choix, elle a  déjà commencé, elle ne nous a pas demandé notre avis. C’est la  mère Nature qui l’a décidé, après nous avoir aimablement laissés jouer avec elle depuis des décennies. La mère Nature, épuisée, souillée, exsangue, nous ferme les  robinets. De pétrole, de gaz, d’uranium, d’air, d’eau. Son ultimatum est clair et sans pitié : Sauvez-moi, ou crevez avec  moi (à l’exception des fourmis et des araignées qui nous survivront, car très résistantes, et d’ailleurs peu portées  sur la danse).
Sauvez-moi ou crevez avec  moi.Évidemment, dit comme ça, on comprend  qu’on n’a pas le choix, on s’exécute illico et, même, si on a  le temps, on s’excuse, affolés et honteux.D’aucuns, un brin  rêveurs, tentent d’obtenir un délai, de s’amuser encore avec  la croissance.
Peine perdue.
Il y a du boulot,  plus que l’humanité n’en eut jamais.
Nettoyer le ciel, laver  l’eau, décrasser la terre, abandonner sa voiture, figer le  nucléaire, ramasser les ours blancs, éteindre en partant, veiller à la paix, contenir l’avidité, trouver des fraises à côté de  chez soi, ne pas sortir la nuit pour les cueillir toutes, en  laisser au voisin, relancer la marine à voile, laisser le  charbon là où il est, – attention, ne nous laissons pas  tenter, laissons ce charbon tranquille – , récupérer le crottin,  pisser dans les champs (pour le phosphore, on n’en a plus, on  a tout pris dans les mines, on s’est quand même bien  marrés).
S’efforcer.
Réfléchir,  même.
Et, sans vouloir offenser avec un terme tombé en désuétude, être solidaire.
Avec le voisin, avec l’Europe, avec  le monde.
Colossal programme que celui de la Troisième Révolution.
Pas d’échappatoire, allons-y.
Encore qu’il faut noter que récupérer du crottin, et  tous ceux qui l’ont fait le savent, est une activité  foncièrement satisfaisante. Qui n’empêche en rien de danser le  soir venu, ce n’est pas incompatible.
A condition que la paix  soit là, à condition que nous contenions le retour de la  barbarie –une autre des grandes spécialités de l’homme – sa  plus aboutie peut-être.
A ce prix, nous  réussirons la Troisième révolution.A ce prix nous danserons, autrement sans doute, mais nous danserons  encore. »

 Fred  Vargas, archéologue et écrivain.


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